mardi 16 avril 2013

Le jardin aux pierres perdues

   On le sait, le bord des routes réservent de belles surprises pour autant que l’on soit attentif et que l’on veuille voir. Depuis le temps que je file dans le Loir-et-Cher pour souffler un peu il fallait bien que ça arrive et c’est en fait sur une petite route départementale de la Sarthe limitrophe que les amis qui m’accueillent régulièrement m’ont signalé la présence d’un ensemble de constructions hors du commun.




   Une fois sur place, le hasard ou la chance ont voulu que l’auteur et propriétaire des lieux soit présent et qui plus est à l’ouvrage. Il est accueillant, étonné mais ravi qu’on se soit arrêté. Les présentations effectuées, notre homme n’est pas avare de commentaires ni d’explications pour peu que que vous répondiez aux innombrables devinettes qu’il vous pose à propos de son travail mais aussi de sa vie. Une conversation menée tambour battant, du tac au tac pour cet homme de 77 ans d’une vitalité exceptionnelle.
 
 
   Depuis cinq ans Michel R. réalise une série de tourelles étranges constituées d’une accumulation de matériaux de construction récupérés dans les décharges ou à la fin des chantiers d’artisans. L’ensemble est  judicieusement agencé par strates successives. Briques, carrelage, ardoises, galets, bouteilles, poteries, sont appareillés avec un sens aigu de la couleur, du rythme et de la texture, le tout exécuté sans une once de mortier. Le procédé et l’allure (dans une moindre mesure) n’est pas sans rappeler les tours des Ruines de la Vacherie à Troyes qui, elles aussi, furent élevées sans ciment, à l’aide de matériaux issus de la démolitions de bâtiments divers.
Les tours des Ruines de la Vacherie à Troyes                                  Coll. JMC
 



   Une dizaine de ces édifices dont le plus grand mesure quatre mètres, trônent le long de la petite route et lorsqu’on lui demande ce qui a déclenché cet envie de bâtir, il reste assez évasif, évoquant tout de même son attirance pour les curiosités architecturales des environs. Il parle des fours à chanvre, de certains pigeonniers ou des chambres de béliers hydrauliques présents dans la région.
 
 
   Ancien ouvrier agricole puis salarié dans le bâtiment à la retraite depuis 15 ans, Michel R. improvise totalement l’édification de ses tours, juché sur des palettes entassées en guise d’échafaudage ; et si les débuts furent laborieux (puisque la première s’effondra au bout de 10 jours !) il maitrise aujourd’hui parfaitement le savoir-faire nécessaire pour que son œuvre soit pérenne. En nous raccompagnant, il nous raconte qu’il vient de trouver dans une décharge une plaque de rue émaillée au nom hautement poétique : ”Allée de la Pierre Perdue”. Il compte bien installer cet objet à l’entrée de son petit terrain et baptiser ainsi son domaine.                               
À Marie et Jean-Luc 
Toutes photos J.M.C. / Doits réservés
 

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Superbe trouvaille!

Emlo et Magik a dit…

Votre blog est magnifique par tout ce qu'il représente d'émotions et de sensibilité.
Votre propre travail à Malakoff est superbe.
Nous prendrons le temps de tout regarder attentivement
Merci à vous

Bruno a dit…

Bonjour Jean-Michel, et bonjour à tes lecteurs.
Il semble que ce monsieur ait hélas passé la main vis-à-vis de ses constructions, qui me font personnellement plus penser à des ruches, ou à des greniers à mil africains (l'ami qui m'accompagnait pensait, lui, à des dame-jeanne). Je suis passé ce mois de juillet 2021, et les constructions commencent à être envahies par la végétation. Le site paraît à l'abandon. L'auteur a-t-il dételé (il aurait 85 ans aujourd'hui si je suis l'âge que tu donnes dans ta note)? Espérons que ce n'est qu'une simple fatigue passagère...