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samedi 14 octobre 2017

La Tour Nesme, l'oubliée du Mont-Cindre

   Mon récent séjour au Mont-Cindre (commune de St-Cyr au Mont-d'Or dans le Rhône) m'a permis de visiter deux sites que je ne connaissais que par l'image et les cartes postales anciennes : le jardin de rocailles de l'Ermitage du Mont-Cindre et la Tour Nesme située à proximité.



   En 2010, avec Jean-François Maurice nous avions consacré le numéro 31 ( Les Inspirés en Soutane) de la revue Gazogène aux curés bâtisseurs ou créateurs et bien évidemment nous avions évoqué l'Ermitage dont l'auteur, Emile Damidot faisait d'ailleurs la couverture. Nous avions également cité l'œuvre de M. Nesme de façon très succincte car à l'époque cet édifice était déjà, depuis longtemps, situé sur une propriété privée et quelque peu négligé. La recherche d'informations sur l'origine de cette curiosité n'avait pas donné grand chose. Je tiens donc à remercier l'actuel propriétaire qui m'a permis, accompagné de Suzanne Paliard (qui organise de nombreuses expositions à l'Estanco du Mont-Cindre) d'entrer sur son terrain acquis il y a cinq ans, pour s'approcher et découvrir cette réalisation insolite. Grâce à lui et au temps qu'il nous a consacré, nous en savons un peu plus sur cet ouvrage dorénavant dissimulé par quelques grands pins derrière deux murs d'enceintes.
 

   Cette construction en pierres dorées extraites d'une carrière des environs, est insolite par sa forme et son aspect. C'est une tour pleine, assez élégante avec un double escalier hélicoïdale : l'un pour monter, l'autre pour redescendre vu l'étroitesse du passage.

   Voulant concurrencer son voisin Emile Damidot (dit frère François) dont le jardin de rocailles attirait de nombreux visiteurs (1), c'est vers 1890 que M. Nesme commença l'édification de cet ouvrage. Supposé avoir été le jardinier de Damidot, on peut comprendre la similitude du style "rocaille" mis en place par notre jaloux pour élever cet étrange promontoire. Au sommet de cette tour de quinze mètres de hauteur, il avait disposé sur l'étroite plateforme, une longue-vue pour que ses visiteurs puissent admirer le panorama. Compte tenu de l'orientation plus à l'Est de la tour, la vue y est moins étendue que sur le  belvédère de l’Ermitage qui culmine à douze mètres.
1 - Certains textes évoquent, probablement de façon exagérée, 20 000 personnes par an à l'Ermitage de frère François !


Une des nombreuses cartes postales vendues sur place à l'époque.
On observe la longue-vue installée pour les visiteurs en haut de la tour.
   Avant d'amorcer l'ascension, les visiteurs devaient au préalable s'engouffrer à partir du deuxième mur d'enceinte dans une sorte de sinueux petit tunnel de pierre qui débouchait sur les premières marches de l'édifice. Pour des raisons évidentes de sécurité, ce qui restait de cette allée couverte a dut être retiré et remplacé par de nouveaux aménagements. Ces travaux furent réalisés avec beaucoup de savoir-faire et dans le respect du lieu par l'actuel propriétaire qui continue à restaurer l'ensemble.
L'accès à l'escalier de montée et ce qui reste de l'allée couverte.
Le muret au premier plan est récent.

 



L'escalier de descente. On remarque l'étroitesse des marches
et le parapet de ce colimaçon n'arrive qu'à mi-cuisse ce qui
rend la circulation assez impressionnante pour ceux qui ont
un peu le vertige (c'est mon cas...).
   Un ruisseau serpentait également au pied de la tour avec un petit pont ainsi qu'une ou deux arches rocailleuses aujourd'hui disparues. Le ruisseau a été comblé mais on en devine encore une légère trace au sol.
Il y a quelques années un pin est tombé, détruisant une partie de ce mur latéral.
L'ouverture a été finalement conservée et remaçonnée.



Partie gauche du deuxième mur d'enceinte restaurée par l'actuel propriétaire.

   Profitant également de l'attrait des promeneurs pour les cafés installés tout autour, l’entrée était payante et la vente de cartes postales organisée à l'extérieur comme le montre un document ancien. Malgré toutes ses stratégies (sur certaines cartes, il se fait même appelé le "nouvel ermite") l’ouverture au public fut de courte durée probablement éclipsée par la mode des guinguettes qui se développa un peu plus tard, plus bas le long de la Saône.  
Le deuxième mur d'enceinte avec son passage de rocailles.
C'est à cet endroit que démarrait l'allée couverte menant jusqu'aux premières marches de la tour.
      Je salue le talent, l'énergie et la passion que cet habitant du Mont-Cindre porte à son acquisition. Même si le regard du public et de quelques institutions a évolué, ce type d'initiative visant à entretenir et sauvegarder ces architectures marginales, brutes ou naïves restent hélas une quasi exception...    Bonsoir !